vendredi 26 août 2022

 

Comment Colruyt compare les prix de ses concurrents mais n’applique pas les baisses partout.

 "Les prix les moins chers", c’est le slogan de Colruyt, leader du secteur de la grande distribution en Belgique. Le réseau de supermarchés se fait fort de comparer les prix pratiqués par ses concurrents et de répercuter les diminutions et promotions sur ses propres produits, histoire de justifier au quotidien la réputation de champion du pouvoir d’achat revendiquée depuis 50 ans. Comment cette comparaison se pratique-t-elle concrètement et quelles en sont les limites ? Pour le savoir, nous nous sommes rendus au siège de la société à Halle, en périphérie bruxelloise.

Colruyt aligne ses prix sur les autres mais pas nécessairement partout.
Tout cela est bien beau mais tous les consommateurs belges ont-ils la garantie de bénéficier des prix les moins chers pratiqués en Belgique ? La réponse n’est pas si évidente que cela. En fait, tout dépend du type de magasin où le prix le plus bas a été repéré. Jean-Christophe Burlet ne s’en cache pas : "Nous nous alignons par rapport au profil de notre concurrent. Si c’est un concurrent national, nous réagissons en alignant nos prix dans tous nos magasins. S’il s’agit d’un concurrent régional, l’adaptation sera limitée à la région et si sa taille est vraiment locale, par exemple un unique magasin dans une ville, notre réaction ne concernera que nos magasins de cette ville. "

Une "armée" de comparateurs de prix
Affirmer qu’on compare les prix des magasins concurrents, cela tient en quelques mots, mais l’organiser sur le terrain, c’est autre chose. Au siège du groupe à Halle (ou chez eux en télétravail), des dizaines d’employés sont penchés sur des dépliants ou sur des écrans d’ordinateurs. Comme l’explique Jean-Christophe Burlet, directeur régional des ventes, Colruyt possède une véritable armée de comparateurs de prix, en bureau mais aussi sur le terrain : "Notre service compte 135 personnes qui comparent chaque jour 62.000 prix pratiqués en Belgique pour être sûrs de proposer en permanence les meilleurs prix."

"La moitié environ de ces personnes comparent les promos en consultant les folders distribués par la concurrence, leurs sites internet, la presse écrite et tout document comportant des prix. Il y a même une boîte aux lettres à l’entrée du bâtiment où notre personnel est invité à glisser des dépliants reçus chez lui pour ratisser le plus large possible.""Ce travail de comparaison et d’encodage des données se déroule en bureau mais nous avons aussi une soixantaine d’employés qui se rendent sur le terrain, en clair qui vont dans les magasins des marques concurrentes pour relever les prix promotionnels ou pas afin de nous permettre de nous aligner. Ils le font anonymement dans différentes régions du pays comme de simples clients.""Nous sommes sûrs ainsi de couvrir la quasi-totalité de l’offre et si, par hasard, un client repère un prix plus bas que chez nous et qui nous aurait échappé, un numéro rouge lui permet de nous le signaler et, après vérification, nous nous adaptons. En moyenne, à partir de nos 62.000 comparaisons quotidiennes, nous adaptons 600 prix chaque jour. Chaque magasin reçoit une liste des nouveaux prix et les étiquettes en rayon sont directement changées en mentionnant le prix réaction."

Comparer les marques "propres", pas simple.

Pour les grandes marques, la comparaison est relativement facile, les produits et les conditionnements sont les mêmes dans toutes les enseignes. Ça se corse quand il faut comparer les produits des marques de supermarchés, ce qu’on appelle les marques propres, par exemple des céréales Delhaize, un choco Cora, des cornichons Carrefour ou une des marques d’Aldi, Lidl, Intermarché ou autre.

"C’est là que ça se complique. Pour commencer, avant de comparer les prix des marques propres des concurrents, il faut comparer les produits, raison pour laquelle nous en achetons beaucoup pour vérifier qu’ils sont équivalents aux nôtres. Nos comparateurs analysent tout, la composition, les ingrédients, la contenance et s’il s’avère que notre gamme propose un produit équivalent, nous adaptons notre prix, quitte à faire un calcul quand le pot de compote de pommes du concurrent fait 340 grammes et le nôtre 420. On se base sur le prix au kilo pour comparer."
Sur son bureau, une dame lit attentivement la notice de plusieurs rouleaux de film alimentaire achetés par un collègue dans diverses enseignes. Elle note consciencieusement les longueurs dans son carnet et encode ensuite les données dans son PC. C’est un programme conçu par le service informatique qui se charge de compiler les données et de transmettre les éventuelles adaptations de prix aux différents sièges du groupe.
"Nous comparons absolument tout, y compris les fruits et légumes, même des vins, par exemple des vins blancs de type Chenin en provenance d’Afrique du Sud. Vous avez ici 5 ou 6 cubis de 3 litres achetés dans diverses enseignes, ils ont des marques différentes mais s’ils sont suffisamment semblables, nous allons aligner le prix du nôtre sur le moins cher. C’est notre engagement du meilleur prix."



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